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réactions de Bernard Le Leannec







Jeudi 5 juillet 2007


Réception du Père Bernard Le Léannec


MM…


Réunis aujourd’hui autour du Révérend Père Bernard Le Léannec,  c’est à l’évidence une rencontre providentielle du Sacré et du profane.

Nous sommes tous dans la joie que nous vaut la reconnaissance éclatante de ses mérites hors du commun, par la décision du Chef de l’Etat de l’élever au grade de Chevalier de la Légion d’honneur.  Car de par les textes qui régissent notre premier ordre national,  ce sont les services exceptionnels que récompense exclusivement le ruban rouge.

Bernard Le Léannec aura 57 ans dans quelques jours :  sa sveltesse,  que je lui envie,  la fraîcheur de son teint,  l’agrément de son sourire comme l’enjouement de sa conversation prouvent suffisamment qu’il n’a jamais cessé d’être le Fils,  élevé à Hennebont,  dans le Morbihan,  au sein d’une famille à la fois profondément patriote et viscéralement chrétienne :  celui qui se souvient que,  selon sa propre expression :  « il n’a jamais vu son père aussi grand que lorsqu’il se mettait à genoux pour lui apprendre à prier ».

Dès l’âge de 11 ans,  ce fils se discerne promis à une vocation très précise : consacrer son existence à l’évangélisation de peuples éloignés.
 

Sa jeunesse,  pourtant,  ne s’écoule pas comme un long fleuve tranquille : il est durement marqué par la maladie et,  plus encore bien sûr,  par la mort prématurée de son cher Père quelques années plus tard.  Mais son admirable mère,  que je salue respectueusement,  veille à ce que rien de cela ne vienne compromettre le désir profond de son fils :  Etre Prêtre !

Il poursuit ses études au séminaire assomptionniste de Saint Maur,  dans le Maine et Loire,  où il a rejoint ses cousins.

A 20 ans, on le trouve en Allemagne chez les Pères assomptionnistes hollandais de Neuss-Reuschenberg où il travaille,  comme Saint Paul sur son métier de tisserand ;  lui,  c’est dans une usine de tracteurs …  C’est à ce moment là qu’il apprend la mort de son cher Père à 44 ans.

Après cette année en usine il se prépare à entrer à la Faculté de Théologie de Münster pour suivre les cours d’un certain Joseph Ratzinger et de plusieurs autres éminents théologiens.  Mais la Providence en décide autrement. C’est Strasbourg qui sera son Alma Mater et là,  à côté de la Faculté catholique,  il n’hésite pas à se risquer sur les bancs de la faculté de théologie protestante…

Toutes ces études connaissent leur couronnement dans la soutenance d’une thèse de doctorat du 3e cycle en novembre 1979 sur « Les rapports Eglise/Etat en Alsace-Moselle » et en font un juriste, canoniste, spécialiste de droit civil ecclésiastique.

Entre-temps,  le jeune Bernard Le Léannec,  par l’ordination sacerdotale,  est devenu le révérend Père Bernard.  C’est ce jour-là qu’en l’embrassant,  Madame,  vous lui avez glissé dans l’oreille cette phrase si riche de simplicité évangélique : « N’oublie jamais,  Bernard,  d’où tu viens… »

A Strasbourg,  comme au diocèse de Metz, ce jeune prêtre se fait,  parmi ses camarades devenus ses confrères,  des amitiés qui ne s’oublient pas et dont certaines se manifestent aujourd’hui ici.

Envoyé à Bordeaux comme vicaire de la paroisse Notre Dame de Salut de Caudéran,  il trouve quand même le moyen d’aller à Rome suivre les cours de l’Université grégorienne.  Mais une vocation nouvelle vient s’ajouter à son ministère sacerdotal : le journalisme,  au journal La Croix,  bien sûr !

Commence alors pour lui une suite de pérégrinations trépidantes entre l’Amérique latine, le Proche-Orient, la péninsule arabique et,  déjà,  un premier séjour en Russie où il célèbre en 1983 pour la première fois une messe à Saint-Louis des Français.  Mais ce n’était alors qu’une brève étape dans ses périples journalistiques.

Pourtant,  en 1989,  La Croix lui demande d’accompagner le cardinal Lustiger qui se rend à Moscou à l’occasion du millénaire du baptême de la Russie.  Le Saint Esprit veille et notre ami Bernard réclame la faveur,  apparemment incongrue,  de passer une sorte d’année sabbatique au sein de l’Eglise orthodoxe russe,  dans l’enceinte,  ô combien sévère,  du grand monastère de Zagorsk où il médite les œuvres de Saint Serge.  Il l’obtient !

Que nous dit-il sur ce temps ?
 

« Le christianisme oriental avec la beauté de son chant,  des vêtements liturgiques,  des icônes,  des lumières,  les parfums que tout cela dégage mêlés à l’encens donnent l’impression que ce christianisme a choisi la voie de la nostalgie des origines… »
Il est présent aux funérailles du Patriarche Pimène et à l’élection de Patriarche actuel Sa Sainteté Alexis II qui l’apprécie.
Revenu en France,  Bernard,  qui a appris le russe à Zagorsk,  ce qui n’a pas dû être facile,  accepte le challenge proposé par sa hiérarchie de rendre aux Assomptionnistes la paroisse de Saint Louis des Français,  en déshérence relative depuis l’entre-deux guerres.

Ce sera chose faite le 6 août 1991, jour de la fête de la Transfiguration.  Il avait trouvé un bâtiment sinistre et délabré,  environné d’immeubles peu engageants.  Sous sa houlette souriante mais terriblement volontaire,  une métamorphose s’opère et Saint Louis des Français aujourd’hui rayonne d’une beauté presque surnaturelle,  comme une sorte d’hymne à la joie.  Mais le Père Bernard est un modeste…  Que nous dit-il à ce sujet ?

« C’est grâce à la persévérance des ambassadeurs de France successifs que cette métamorphose a pu se réaliser,  s’agissant en particulier de la restitution d’une spacieuse maison voisine où s’installe le lycée français de Moscou,  facilitant ainsi les contacts avec les jeunes et leurs familles ».

La paroisse s’étoffe ;  des communautés de langues diverses s’y rassemblent et se rencontrent.  Et,  au-dessus de tout cela,  la musique alerte et joyeuse d’une magnifique cloche,  offerte et installée voici déjà quelques années grâce à la bienveillante générosité de Madame Ninon Friedrichs,  mère de notre hôtesse Madame Krejtman et dont je salue avec bonheur la présence,  dans le souvenir de son cher mari disparu.

Cette cloche baptisée Lucie résonne comme un appel,  pour l’émergence d’un Ordre Assomptionniste russe,  ferment de renouveau christique dans la Sainte Russie,  au côté de l’Eglise orthodoxe.  Le Père Bernard souligne avec chaleur qu’il ne s’agit pas là d’une concurrence entre Eglises mais bien d’une convergence mystique et d’une contribution fervente à l’Unité des chrétiens si ardemment souhaitée par le Christ dans notre monde troublé.

Ne faut-il pas voir un signe de cette convergence dans le fait que la municipalité de Moscou vient d’inscrire Saint Louis des Français au premier rang des églises restaurées dans la capitale russe ?

J’ai beaucoup parlé du prêtre.  Mais la Légion d’honneur n’est pas l’Ordre de Saint Grégoire le Grand !  Et,  à l’évidence,  Napoléon Bonaparte à l’origine de son institution souhaitait d’abord récompenser les services rendus à la Patrie !

Qu’en est-il pour notre Révérend Père ?

Bernard Le Léannec,  dès sa plus tendre enfance,  se révélait,  en bon breton,  un vrai patriote : il n’a que 4 ans lorsque le drame de Dien Bien Phû s’imprime dans sa jeune mémoire ;  quelques années plus tard il s’enthousiasme du sursaut national qui se concrétise dans les débuts prometteurs de la Vème République.  Il s’émeut de l’assassinat du Président Kennedy,  espoir de toute une jeunesse,  il pleure le bon Pape Jean XXIII,  grand ami de notre pays,  et même la disparition d’Edith Piaf,  fille du peuple,  ne reste pas sans écho dans son cœur.
 

Dans sa vie d’adulte et son parcours sacerdotal,  Bernard Le Léannec s’accomplit en missionnaire de la France partout où il va.  Certes,  les contrées qu’il traverse et où il travaille l’induisent à de nouvelles fidélités,  voire,  en ce qui concerne sa chère Russie,  à une allégeance « fusionnelle » avec celle de son pays natal.

Monsieur l’Ambassadeur,  il faut l’entendre célébrer avec chaleur « les qualités si riches et si débordantes du peuple russe… »

Nous ne devons jamais perdre de vue que l’homme que vous avez devant vous,  et sur la poitrine de qui je vais épingler la Croix de la Légion d’honneur, n’a cessé de faire rayonner dans une infinité de nations,  au-delà de sa foi chrétienne et de son amour du prochain,  toutes les vertus qui justifient la confiance de tant de peuples dans le génie universel de la France.

C’est grâce à des français et à des françaises qui lui ressemblent et qui oeuvrent comme lui dans un don total à la communauté humaine que notre République révèle son vrai visage,  celui qui faisait dire à Georges Clemenceau : « Hier soldat de Dieu,  aujourd’hui soldat de l’humanité,  le français sera toujours le soldat de l’Idéal ».


BERNARD LE LEANNEC,

AU NOM DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE ET EN VERTU DES POUVOIRS QUI NOUS SONT CONFIES,  NOUS VOUS FAISONS CHEVALIER DE LA LEGION D’HONNEUR…